Le 13 mai 2025, les représentants au plus haut niveau de 13 États membres du Conseil de l’Europe ont signé à Luxembourg la Convention sur la protection de la profession d’avocat. Depuis lors, quatre autres pays se sont joints, ce qui porte le nombre d’États signataires à 17.
Il s’agira du premier instrument juridique international contraignant spécifiquement dédié aux avocats et consacrant le rôle fondamental qu’ils jouent en faveur de l'accès à la justice et du respect de l'état de droit.
Cette convention revêt donc une importance historique pour la profession mais aussi pour les justiciables car elle a pour objet d’améliorer l’accès à la justice pour les citoyens et de consolider l’état de droit dans les pays signataires.
Il est important de noter que les États non européens pourront signer et adopter la convention.
Pourquoi une telle Convention ?
Les menaces pesant sur les avocats se multiplient, individuellement ou sur les représentants de la profession, provenant d’autorités étatiques et non étatiques, conduisant ainsi à l’érosion de leur indépendance. Ces actes peuvent prendre notamment la forme d’agressions, du harcèlement, d’intimidations et de l’adoption de restrictions légales à l’exercice de la profession.
Cela a pour conséquence que la capacité de la profession d’avocat à défendre les droits et à maintenir l’état de droit sont compromises, à des degrés divers dans les pays.
Quels sont les objectifs de la Convention ?
Protéger les avocats contre les agressions, les menaces et les actes d’intimidation.
Garantir leur indépendance et leur autonomie professionnelle.
Sauvegarder et renforcer le rôle essentiel de la profession dans la défense de la justice, de l’état de droit et des droits humains.
L’importance de la Convention
Les États signataires s’engagent à garantir l’indépendance et la sécurité des avocats.
Un mécanisme de suivi, le Groupe d’experts sur la protection de la profession d’avocat (GRAVO), veillera à la bonne application de la Convention (évaluations périodiques pour le suivi de la mise en œuvre générale de la Convention; procédure d'urgence pour les violations graves ou systémiques). Le GRAVO disposera à la fois d’une procédure d’évaluation périodique de la mise en œuvre par les États parties et d’une procédure d’urgence, permettant de réagir rapidement en cas de violations graves ou systémiques.
Les avocats pourront s'appuyer sur la Convention comme référence dans leurs arguments juridiques, celle-ci constituant une forme de standard minimum de l’état de droit qui doit être atteint et respecté dans les différents systèmes juridiques.
Quand la Convention entrera-t-elle en vigueur ?
Lorsque 8 pays, dont 6 États membres du Conseil de l’Europe l’auront ratifiée.
Quels sont les principes clés de la Convention ?
1. Indépendance et autonomie
L’indépendance et l’autonomie des associations professionnelles telles que les barreaux seront garanties.
Il s’agira de prévenir toute action portant atteinte à l’indépendance des avocats ou des associations professionnelles.
2. Barreaux (associations professionnelles)
Les associations professionnelles seront habilitées à représenter les intérêts des avocats, à défendre leur indépendance, à élaborer et à promouvoir le respect des normes de conduite professionnelle, à assurer l'accès à la profession, à soutenir la formation des avocats, à coopérer sur les questions juridiques avec les organisations intergouvernementales et non gouvernementales et à promouvoir le bien-être des avocats.
Les gouvernements devront consulter rapidement et efficacement les associations professionnelles sur les changements législatifs ou réglementaires affectant les avocats ou leur profession.
3. Droits des avocats
Les avocats pourront de manière effective fournir des conseils, une assistance et une représentation juridiques, y compris la défense des droits humains, et auront la liberté d'accepter, de refuser ou de mettre fin à leurs relations avec leurs clients (avec des possibles exceptions nécessaires pour garantir l'accès à la justice).
Les avocats auront rapidement accès à leurs clients, même ceux qui sont privés de liberté.
Les avocats auront un accès effectif aux pièces pertinentes détenues par les autorités publiques et les tribunaux, et une communication sans restriction avec les cours et tribunaux où ils sont habilités à comparaître.
4. Confidentialité
La confidentialité des communications avocat-client, pilier fondamental de la profession d’avocat sera protégée.
5. Protection contre les actes illégaux et les menaces
Les avocats seront protégés contre les agressions, les menaces, le harcèlement ou les procédures disciplinaires injustes.
La liberté d’expression des avocats, notamment en ce qui concerne les affaires de leurs clients, pour assurer une défense efficace sera garantie.
Les avocats ne seront pas sanctionnés pour avoir représenté des personnes ou des causes susceptibles d'être controversées ou politiquement sensibles pour ne pas compromettre l'accès à la justice et la protection des droits.
Les avocats détenus pourront avoir accès à une représentation juridique indépendante.
Les enquêtes sur les attaques ou menaces visant les avocats pour tenir les auteurs responsables de leurs actes seront menées à terme.
6. Accès à la profession
L’admission, le maintien et la réadmission à la profession d’avocat soient fondés sur des critères objectifs, pertinents et transparents, sans discrimination seront garantis.
Les décisions d’admission seront prises par un organe indépendant et pourront faire l’objet d’un appel, garantissant ainsi équité et transparence.
7. Procédures disciplinaires
Des procédures équitables, impartiales et transparentes en matière de discipline afin de protéger les droits des avocats et de garantir l’indépendance de la profession seront établies. Les recours contre les décisions disciplinaires doivent pouvoir être portés devant une juridiction ou un tribunal indépendant.
EN CONCLUSION
Suite à la session spéciale du Sénat International des Barreaux de l'UIA qui s'est tenue à Londres le 6 juin 2025 et au cours de laquelle la Convention a été présentée et discutée par des Barreaux de différents continents, l’UIA invite solennellement l’ensemble de ses membres à agir auprès de leurs États respectifs, qu’ils soient européens ou non, afin de promouvoir la signature et la ratification de cette Convention pionnière, qui constitue une avancée majeure pour la défense de la profession d’avocat et de l’état de droit.