Pour cette 21ème journée mondiale contre la peine de mort, la Coalition a choisi le thème « La peine de mort : une torture irréversible », afin de mettre en lumière la relation entre l’application de la peine capitale et la torture ou d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (PTCID), dans la continuité de l’année 2022 [1] .
L’UIA-IROL réaffirme son engagement en faveur de l’abolition universelle de la peine de mort et exhorte les États à cesser d’appliquer la peine capitale en toutes circonstances, afin de se conformer aux droits humains tels que reconnus par le droit international.
En 2022, la 20ème journée mondiale contre la peine de mort avait été l’occasion d’amorcer la réflexion sur le fait que la mise en œuvre de la peine capitale place les États qui la pratiquent en contradiction avec les normes prohibant la torture et des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (PTCID), normes impératives du droit international (jus cogens) [2] . Tout au long de son parcours pénal, la personne condamnée à la peine capitale est en effet soumise à traitement inadmissible [3].
Outre les tortures physiques ou psychologiques parfois appliquées au cours des interrogatoires, le phénomène du couloir de la mort vécu par la personne dans l’attente de son exécution, est de nature à provoquer de lourdes souffrances psychiques et physiques, constitutifs de traitements cruels, inhumains ou dégradants. Tel était le raisonnement de la Cour européenne des droits de l’Homme [4], suivie par d’autres Cours régionales [5] et le Comité des droits de l’Homme [6]. Par ailleurs, l’exécution elle-même inflige une souffrance assimilée à de la torture et à une peine cruelle, inhumaine ou dégradante, quelle que soit la méthode d’exécution [7]. Les discriminations fondées sur le genre, la pauvreté, l’âge, l’orientation sexuelle, le statut de minorité religieuse ou ethnique, auxquelles font régulièrement face les personnes passibles de la peine de mort, aggravent de surcroit le traitement cruel, inhumain et dégradant de cette pratique.
Enfin, la peine de mort créé une douleur injustifiable pour les proches de la personne condamnée, et notamment ses enfants. Elle cause des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ainsi que de lourds traumatismes transgénérationnels.
« La peine de mort ne fait qu'engendrer de nouvelles souffrances. L'expérience montre que dans la plupart des cas, les proches des victimes ne trouvent malheureusement pas la paix dans l'exécution de l'auteur du crime. Au contraire, la souffrance et la douleur sont infligées à une autre famille, celle de l'auteur du crime. Plusieurs fois, le jour d'une exécution, j'ai regardé les visages de ceux dont le père, le frère ou le fils avait perdu la vie à cause de la violence de l'État. J'ai été témoin de leur désespoir, j'ai vu l'horreur abyssale dans leurs yeux » [8] .
Aujourd’hui, 112 États ont aboli la peine de mort pour tous les crimes et neuf États pour les crimes de droit commun [9] . À la fin de l’année 2022, il restait dans le monde un nombre de condamnés à mort connus de 28.282 [10.
L’UIA-IROL persistera à appeler les États à rejoindre la tendance mondiale vers l’abolition de la peine de mort.
L’objectif de cette mobilisation est avant tout de lutter pour la protection des droits des personnes confrontées à la peine de mort. Il ne s’agit pas d’opposer les thèses abolitionnistes aux thèses rétentionnistes, mais précisément de défendre les droits humains de près de 30 000 personnes condamnées à mort dans le monde.
Nous vous invitons à vous informer plus amplement sur la 21ème Journée mondiale, à rejoindre la réflexion sur la peine de mort comme torture irréversible et à solliciter l’abolition de la peine capitale dans tous les États et en toutes circonstances.
Comme chaque année, nous encourageons les membres de l’UIA et la communauté juridique à s’engager et à soutenir les efforts entrepris par la communauté abolitionniste.
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[1]Voir UIA-IROL, 20ème Journée mondiale contre la peine de mort – LA PEINE DE MORT, UN CHEMIN PAVÉ DE TORTURE, 10 octobre 2022.
[2] Coalition mondiale contre la Peine de Mort et quinze autres organisations, Note de position, La peine de mort et l’interdiction de la torture et des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, août 2023.
[3] Coalition Mondiale contre la Peine de Mort, Rapport Journée mondiale contre la peine de mort 2022, La peine de mort, un chemin pavé de torture, Juin 2023.
[4] Cour européenne des droits de l’Homme, Soering c. Royaume-Uni, requête n° 14038/88, 7 juillet 1989, § 111 ; Cour européenne des droits de l’Homme, Einhorn c. France, requête n°71555/01, 16 octobre 2021, § 26.
[5] Cour interaméricaine des droits de l’Homme, Hilaire, Constantine and Benjamin et al. v. Trinidad and Tobago (EN), Arrêt du 21 juin 2002, § 168 ; Commission interaméricaine des droits de l’Homme, Russell Bucklew c. États-Unis (EN), Rapport n° 71/18, Affaire 12.958, 10 mai 2018, § 91.
[6] Comité des droits de l’homme, Observation générale No 36 - Article 6 : droit à la vie, CCPR/C/GC/36, 3 septembre 2019, § 40.
[7] Voir par exemple : Cour européenne des droits de l’Homme, Al-Saadoon et Mufdhi c. Royaume-Uni, requête n°61498/08, 4 octobre 2010, § 115 ; Comité contre la torture des Nations Unies, Examen des rapports soumis par les États parties en application de l'article 19 de la Convention - États-Unis d'Amérique, CAT /C/USA/CO/2, 25 juillet 2006, § 31.
[8] 21ème Journée mondiale contre la peine de mort, Témoignages, Torture et peine de mort, p. 16 : témoignage de Gabi Uhl, Présidente de la Coalition allemande pour l’abolition de la peine de mort, qui a assisté à trois exécutions dans l’État du Texas.
[9] Coalition Mondiale contre la Peine de Mort, 21ème Journée mondiale contre le peine de mort, Faits et chiffres 2022-2023.
[10] Amnesty International Belgique, La peine de mort en 2022 : Faits et chiffres, 16 mai 2023.