Peine de mort

Déclaration Journée mondiale contre la peine de mort 2025 - SÉCURITÉ, JUSTICE ET PEINE DE MORT : UN FAUX DILEMME

Ce 10 octobre, l’Institut pour l’État de droit de l’Union Internationale des Avocats – (UIA-IROL) rejoint la Coalition mondiale contre la peine de mort, ainsi que les acteurs abolitionnistes du monde entier pour commémorer la 23ème Journée mondiale contre la peine de mort. L’institut réaffirme son engagement sans équivoque en faveur de l’abolition universelle de la peine capitale en toutes circonstances. Le thème réitéré cette année, « Peine de mort et sécurité », rappelle une vérité essentielle : la peine de mort ne protège personne.

Depuis des décennies, les données scientifiques et l’expérience comparée des États démontrent l’absence de lien entre sévérité des sanctions et réduction de la criminalité. Pourtant, face aux menaces réelles ou perçues pesant sur la sécurité nationale ou la sécurité des citoyennes et citoyens, certains gouvernements invoquent encore la peine capitale comme une solution prétendument efficace. En réalité, loin de protéger les sociétés, la peine de mort constitue un instrument inefficace de dissuasion, une violation grave des droits humains équivalant à la torture ou à un traitement cruel, inhumain et dégradant, un mécanisme discriminatoire frappant de manière disproportionnée les groupes les plus vulnérables, et une sanction irréversible exposant les systèmes judiciaires au risque d’erreurs fatales. Les condamnations à mort sont par ailleurs souvent prononcées à l’issue de procédures diligentées en méconnaissance du droit au procès équitable.

Garantir la sécurité est un devoir essentiel des États. Mais la sécurité ne saurait se confondre avec la répression. Elle repose sur des institutions de justice solides, indépendantes, accessibles et équitables, capables de s’attaquer aux causes profondes de la criminalité : inégalités socio-économiques, discrimination, marginalisation. Loin de renforcer la paix sociale, l’usage de la peine capitale alimente la violence et la défiance à l’égard de l’État de droit. La justice ne peut se réduire à une vengeance ; elle doit garantir à la fois la protection des victimes, la réinsertion des auteurs et la cohésion sociale.

Dans divers contextes, qu’il s’agisse de lutte contre le terrorisme, de conflits armés, de répression politique ou des crimes liés à la drogue, la peine de mort est utilisée comme un outil symbolique ou politique. Elle est présentée comme une réponse aux peurs collectives, mais ne contribue ni à la réduction de la criminalité ni au rétablissement de la confiance sociale. Cette instrumentalisation fragilise au contraire les fondements démocratiques et les garanties de l’État de droit.

En 2024, plus de 1.500 personnes ont été exécutées dans 15 États à travers le monde, y compris pour des infractions n’entrant pas dans la catégorie des « crimes les plus graves » [1], tels que les infractions liées au trafic de stupéfiants ou le blasphème en Asie du Sud-Est, en Iran ou en Chine, où le nombre de personnes condamnées à mort reste d’ailleurs secret. [2]

En cette Journée mondiale contre la peine de mort, l’UIA-IROL invite les avocats, juristes et défenseurs des droits humains à poursuivre leur lutte pour la suppression définitive de cette pratique archaïque.

L’UIA-IROL appelle les États rétentionnistes à instaurer immédiatement un moratoire sur les exécutions comme première étape vers l’abolition. Il invite les gouvernements abolitionnistes en pratique à franchir le pas législatif en inscrivant l’abolition dans leur droit interne. Il encourage l’ensemble des États à ratifier le Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Il appelle enfin la communauté internationale à promouvoir des politiques de sécurité respectueuses des droits humains et orientées vers la justice réparatrice et la prévention des violences.

La sécurité véritable ne peut naître que du respect de la dignité humaine, de la justice équitable et de la primauté du droit. La peine de mort, en niant ces valeurs, n’apporte qu’une illusion de protection.

L’UIA-IROL se tient aux côtés de toutes celles et ceux qui, dans le monde, militent pour un avenir où la justice se construit sans exécutions.

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[1] L’article 6-2 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques limite le recours à la peine de mort aux « crimes les plus graves », c’est-à-dire des crimes impliquant un homicide volontaire, conformément à l’Observation générale no 36 du Comité des droits de l’homme (para.39).
[2] Amnesty International, Rapport mondial, « Condamnation à mort et exécutions 2024 ».