Déclaration conjointe du Président de l’UIA et du Directeur Général de l’UIA-IROL
Réaffirmant la vocation de l’Union Internationale des Avocats à promouvoir l’État de droit et à défendre les droits humains, y compris dans les situations de conflit armé, quand ils sont le théâtre de graves violations visant les populations civiles;
Rappelant ses précédentes déclarations publiées en octobre 2023, par lesquelles l’Union Internationale des Avocats a, d’une part, condamné l’attaque perpétrée par le Hamas en Israël le 7 octobre 2023, et, d’autre part, exprimé sa profonde inquiétude face aux pertes civiles massives à Gaza, appelant l’État d’Israël à respecter le droit international humanitaire ;
Exprimant sa plus vive inquiétude face à l’aggravation continue de la catastrophe humanitaire dans les territoires palestiniens occupés – en particulier dans la bande de Gaza, mais également en Cisjordanie et à Jérusalem-Est – où la population civile, notamment les femmes, les enfants, les personnes handicapées et âgées, fait face à des conditions de survie de plus en plus précaires ;
Constatant que cette situation résulte notamment de l’impossibilité persistante d’accéder à une aide humanitaire suffisante, comme l’ont confirmé ces derniers mois des sources crédibles, parmi lesquelles l’Organisation des Nations Unies et ses agences spécialisées, la résolution adoptée par l’Assemblée générale le 12 juin 2025, ainsi que les ordonnances de la Cour internationale de justice (CIJ) et les mandats d’arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) ;
Constatant qu’un blocus des biens et des fournitures a conduit à une quasi-paralysie des opérations humanitaires pourtant essentielles à la survie, privant les civils d’un accès à l’eau, à l’assainissement, à l’hygiène, aux soins et à la nourriture, avec plus d’un demi-million de personnes aujourd’hui menacées de famine ;
Soulignant enfin l’existence de nombreuses preuves faisant état d’attaques délibérées contre des biens indispensables à la vie des civils, menaçant directement la survie de la population palestinienne dans la bande de Gaza ;
Rappelant que la prise d’otages constitue une violation grave du droit international humanitaire, et que la libération immédiate, inconditionnelle et digne de toutes les personnes retenues est une exigence impérative ;
Soulignant que toute réponse, y compris les opérations militaires conduites par un État, doit impérativement respecter les principes fondamentaux du droit international humanitaire – en particulier les principes de distinction, de proportionnalité et de précaution –, et ne saurait justifier des actes indiscriminés ou disproportionnés ;
Rappelant à cet égard que le fait d’affamer délibérément une population civile constitue une violation grave du droit international humanitaire, expressément interdite par la Convention de Genève (IV) du 12 août 1949, et susceptible de relever, selon les cas, du champ de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide ;
Rappelant que l'interdiction du génocide constitue une norme impérative du droit international, fondée sur la nécessité de protéger les valeurs humanitaires les plus fondamentales, et que les obligations découlant de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide s’imposent à tous les États, qui ont un intérêt commun à les faire respecter ;
Rappelant les ordonnances de la CIJ des 26 janvier 2024, 28 mars 2024 et 24 mai 2024 dans l'affaire Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide dans la bande de Gaza (Afrique du Sud c. Israël), dans lesquelles la Cour a estimé qu’ « au moins certains des droits que l'Afrique du Sud revendique [découlant de la Convention sur le génocide] et dont elle sollicite la protection sont plausibles », et le « droit des Palestiniens de Gaza d'être protégés contre les actes de génocide et les actes prohibés connexes » (par. 54) ;
Rappelant que dans ces décisions, la Cour a également souligné que toutes les parties au conflit dans la bande de Gaza sont tenues de respecter le droit international humanitaire ;
Notant en outre que la Cour a exprimé une grave préoccupation quant au sort des otages enlevés lors de l'attaque en Israël le 7 octobre 2023, et a exigé leur libération immédiate et inconditionnelle ;
Constatant enfin que la Cour a ordonné à l’État d’Israël de prendre toutes les mesures en son pouvoir pour prévenir la commission de tout acte entrant dans le champ d’application de l’article II de la Convention sur le génocide, en ce qui concerne les Palestiniens de la bande de Gaza ;
Rappelant en outre que dans sa dernière ordonnance provisoire du 28 mars 2024, la Cour a enjoint à Israël d'assurer, en coopération avec l'Organisation des Nations Unies, un accès humanitaire immédiat, sans restriction et à grande échelle, à destination de l’ensemble des civils de la bande de Gaza ;
Relevant que cette ordonnance impose la fourniture urgente de services essentiels – notamment la nourriture, l’eau, l’électricité, le combustible, les abris, les vêtements, les produits d’hygiène, l’assainissement, ainsi que les soins médicaux et le matériel afférent ;
Soulignant que la Cour a également exigé l’accroissement de la capacité et du nombre de points de passage terrestres, et leur maintien ouvert aussi longtemps que nécessaire, afin de permettre l’acheminement effectif de l’aide.
Rappelant les mandats d’arrêt délivrés par la Cour pénale internationale à l’encontre de plusieurs individus dans le cadre du conflit en cours, et soulignant que tous les États parties au Statut de Rome ont l’obligation juridique de coopérer pleinement avec la Cour, notamment en procédant à l’arrestation et à la remise des personnes recherchées ;
Rappelant également que la jurisprudence constante de la Cour a confirmé que l’immunité personnelle ne saurait être opposée à l’exécution de ces mandats, cette immunité ayant été jugée incompatible avec l’objet et le but du Statut de Rome ;
Rappelant la résolution de l'Assemblée générale des Nations unies A/ES-10/L.34/Rev.1 adoptée le 12 juin 2025, intitulée « Protection des civils et respect des obligations juridiques et humanitaires », avec un soutien massif (149 voix pour, 12 contre, 19 abstentions, 13 absents sur 193 membres) ;
Relevant que cette résolution exige notamment :
• un cessez-le-feu immédiat, inconditionnel et permanent ;
• la libération immédiate, digne et inconditionnelle de tous les otages ;
• la condamnation explicite du recours à la famine des civils comme méthode de guerre ;
• et le refus illégal de l’accès humanitaire ;
Rappelant que cette résolution réaffirme également les obligations d’une puissance occupante, en particulier le respect des principes d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance, en coordination avec les Nations unies, afin de garantir un accès sans entrave à l’aide humanitaire essentielle – incluant nourriture, eau potable, fournitures médicales, carburant, équipements, abris et services de base – à l’ensemble des civils palestiniens.
Par cette déclaration, l'UIA et l’UIA-IROL :
- s’associent à l’appel lancé par les Nations unies en faveur d’un cessez-le-feu immédiat, inconditionnel et permanent, et de la libération immédiate, digne et inconditionnelle de tous les otages détenus par le Hamas et d’autres groupes;
- réaffirment leur attachement aux principes fondamentaux d’humanité, de dignité, de justice, ainsi qu’au respect du droit international humanitaire, et à l’acheminement sans entrave de l’aide humanitaire essentielle à toutes les populations civiles – en particulier les plus vulnérables : femmes, enfants, personnes âgées ou en situation de handicap;
- invitent la communauté internationale, les institutions nationales, régionales et internationales, ainsi que la société civile, à s’engager en faveur d’une paix fondée sur les droits fondamentaux et le respect strict du droit international, y compris l’obligation de prévenir les actes de génocide;
- renouvellent leur engagement à promouvoir et défendre l’État de droit, les droits humains et la résolution pacifique des conflits, et offrent à ce titre leur contribution concrète : par la formation des juristes à la négociation et à la médiation internationales, et par la constitution d’équipes indépendantes, neutres et impartiales, prêtes à accompagner toute initiative crédible de médiation en faveur de la paix.
Carlo Mastellone
Président de l'UIA
Martin Pradel
Directeur Général de l'UIA-IROL