Selon nos informations, Maître Palankoy a été arrêté le 14 mars 2025, dans les locaux de son cabinet par des agents du Conseil National de Cyberdéfense, sans mandat ni décision judiciaire. Depuis lors, il est maintenu en détention au secret, privé de tout contact même avec sa famille ou son avocat, et sans avoir été présenté devant un juge.
Dans un contexte de plus en plus préoccupant pour la profession d’avocat en République démocratique du Congo, la situation de Maître Palankoy s’inscrit dans un schéma alarmant d’arrestations récurrentes et arbitraires, et de détentions au secret prolongées d’avocats, vraisemblablement en lien avec l’exercice de leurs fonctions professionnelles.
L’UIA-IROL rappelle que l’indépendance et la liberté des avocats sont des corolaires indispensables à l’État de droit et à la garantie effective du droit d’accès à la justice. Toute pratique susceptible de porter atteinte au respect des droits fondamentaux et des garanties accordées aux avocats doit donc être fermement condamnée.
À cet égard, l’UIA-IROL souligne qu’en vertu des Principes de base des Nations Unies relatifs au rôle du barreau, ainsi que des Directives et principes sur le droit à un procès équitable et à l’assistance judiciaire en Afrique, il incombe à la République démocratique du Congo de veiller à ce que les avocats puissent exercer leurs fonctions professionnelles « sans entrave, intimidation, harcèlement ni ingérence indue », et qu’ils ne fassent pas l’objet de poursuites ou des sanctions pour « toutes les mesures prises conformément à leurs obligations et normes professionnelles reconnues et à leur déontologie ». [1]
Ces instruments précisent par ailleurs que « les avocats ne doivent pas être assimilés à leurs clients ou à la cause de leurs clients du fait de l’exercice de leurs fonctions ». [2]
L’UIA-IROL rappelle également que la Constitution de la République démocratique du Congo garantit que :
- toute personne arrêtée doit être immédiatement informée des motifs de son arrestation et de toute accusation portée contre elle, et ce, dans une langue qu’elle comprend ; qu’elle doit être immédiatement informée de ses droits ; qu’une personne placée en garde à vue a le droit d’entrer immédiatement en contact avec sa famille ou avec son conseil (article 18) ;
- toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue dans un délai raisonnable par un juge compétent ; que le droit de la défense est organisé et garanti (article 19).
En outre, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ratifié par la République démocratique du Congo, consacre en son article 9 que « tout individu a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. Nul ne peut faire l’objet d’une arrestation ou d’une détention arbitraire. Nul ne peut être privé de sa liberté, si ce n’est pour des motifs et conformément à la procédure prévus par la loi (…) ».
L’UIA-IROL en appelle aux autorités congolaises pour qu’elles fassent le nécessaire afin que la situation de Maître Palankoy réponde aux obligations nationales et internationales de la République démocratique du Congo, et pour qu’il soit procédé sans délai à sa libération. L’UIA-IROL exhorte donc notamment les autorités à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir, en toutes circonstances, son intégrité physique et psychologique ainsi que le respect de son droit à un procès équitable, y compris le droit d’accéder à l’avocat de son choix.
De manière plus générale, l’UIA-IROL appelle les autorités congolaises à garantir que les avocats puissent exercer leurs activités professionnelles en toute sécurité, sans crainte de représailles, d’intimidation ou d’ingérences illégales.
L’UIA-IROL exprime sa solidarité avec Maître Médard Palankoy et saisit cette occasion pour apporter son soutien à l’ensemble des avocats congolais qui continuent, dans des circonstances très difficiles, d’assumer le rôle essentiel qui est le leur dans la défense de l’État de droit.
L’UIA-IROL continuera de suivre cette situation avec la plus grande attention.
[1] Principes de base des Nations Unies relatifs au rôle du barreau, adoptés lors du Huitième Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquant, La Havane, Cuba, 1990, Principe 16; Directives et principes relatifs au droit à un procès équitable et à l’assistance judicaire en Afrique, adoptés par la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, 2003, article I. b).
[2] Principe 18 des Principes de base des Nations Unies and Principe I (g) des Directives et principes en Afrique.